LES AÇORES - UN JARDIN SUR L'ATLANTIQUE
Vagabonder, j’aime vagabonder entre deux lumières. Attendre aussi.
Après l’île de Pâques au milieu de l’Océan Pacifique, les Açores au centre de l’Atlantique m’ont happée.
L’air y est vif. Vent et embruns vous y frappent de plein fouet. Le contraste de la mer, au bleu de cobalt intense qui bat au pied des falaises sombres et abruptes et du vert lumineux des pâturages, paraît irréel. Nuages et soleil jouent à cache-cache, tantôt illuminant le paysage, tantôt brouillant l’atmosphère de légères brumes ou d’épais brouillards. Le pépiement de quelques oiseaux, épuisés par un long voyage, se mêle au son des cascades qui dévalent bruyamment des hauts monts. Ils se ressourcent. Comme nous.
Longtemps les regards se sont tournés vers les Açores comme les vestiges du mystérieux continent évoqué par Platon : l’Atlantide fondé par Atlas et détruit par Zeus. Si tenté qu’un tel continent eut sombré dans les abysses, il n’en resterait au milieu de l’Atlantique Nord qu’un chapelet de neuf îles, qui s’éparpille sur 600 km à mi-chemin entre l’Europe et l’Amérique. Petits cailloux blancs sur le chemin d’un empire qui vit les navigateurs portugais partir la peur au ventre dans l’espoir de revenir cousus d’or et de gloire. Les alizées à leur retour ne manquaient pas de les ramener vers l’archipel. Anses protectrices et étapes essentielles pour leur ravitaillement, promesse d’un repos réparateur, avant d’affronter à nouveau des vagues parfois dantesques et de retrouver leur port d’attache.
Dans leur isolement, face à la muraille érigée par la mer, je me suis souvent demandé, par quel miracle d’héroïques pionniers avaient apprivoisé cette terre et, mieux encore, l’avaient faite fructifier ? En proie à des caprices sismiques récurrents, à de multiples épidémies, aux attaques de corsaires et de pirates, suivies de razzias qui ne les épargnèrent pas, leur foi, disent-ils leur a permis de résister. Si les caravelles et les galions qui gisent aux creux des fosses sous-marines pouvaient s’exprimer, que d’épopées ils nous conteraient. Au gré des îles, aux paysages tour à tour lunaires ou bucoliques, j’ai eu l’impression de faire le tour du monde. Au Sri Lanka avec des plantations de thé, uniques en Europe, à Hawaï avec les surfeurs, ou à Chamonix paradis du parapente et des forêts alpines. M’éloignant des champs de fumerolles, comme en pays Afar au nord de la Somalie, j’ai rejoint les amateurs de farniente sur les plages de sable noir ressemblant comme deux gouttes d’eau à celles qui bordent les îles Stromboli. Sans oublier les rivages de la péninsule de Valdez en Argentine où prolifèrent les cétacés comme les cachalots et les dauphins qui y ont élu demeure et les mythiques baleines bleues qui y croisent au printemps.